PAR LES CHAMPS ET PAR LES GREVES
Nous terminons (hélas !), Max et moi, un voyage qui a été une fort jolie excursion. Sac au dos et souliers ferrés aux pieds nous avons fait sur les côtes environ 160 lieues à pied, couchant quelquefois tout habillés faute de draps et de lit et ne mangeant guère que des oeufs et du pain faute de viande. Tu vois, vieux, qu’il y a aussi du sauvage sur le continent. La mer ! la mer ! le grand air, les champs, la liberté, j’entends la vraie liberté, celle qui consiste à dire ce qu’on veut, à penser tout haut à deux, et à marcher à l’aventure en laissant derrière vous le temps passer sans plus s’en soucier que de la fumée de votre pipe qui s’envole. » Par les champs et par les grèves se présente ainsi comme une virée buissonnière. Un beau matin de mai 1847, comme des gamins échappés de l’école, deux écrivains rêvant d’une existence hors des sentiers battus prennent discrètement la tangente et partent sillonner les routes de l’ouest de la France dans le but avoué de se la couler douce… De cette balade amicale, ils rapportent un livre à deux voix, Flaubert se chargeant des chapitres impairs et Du Camp des autres. Cette oeuvre de « pure fantaisie et digressions » reste la plus belle évocation des régions racées de l’Anjou, de la Touraine et de la Bretagne.